6 autres romans de la Rentrée Littéraire ont retenu mon attention. 6 styles. 6 auteurs.
Chamberlain Diane – Une vie plus belle
Une fille de quatre ans. Un père confronté à des choix impossibles… Une belle leçon de courage et d’espoir.
Quand ils se sont rencontrés, Robin et Travis avaient quinze ans. L’année d’après, ils tombaient amoureux. Pour eux, tout a été trop vite, trop fort : quand Robin est tombée enceinte, leur monde et la vie qu’ils voulaient se construire ont volé en éclats. Une seule chose est restée : Bella, la petite fille adorée que Travis élève seul depuis sa naissance, quatre ans auparavant — depuis que Robin les a abandonnés, tous les deux.
Mais lorsque leur maison est détruite dans un incendie, et que le spectre de la pauvreté se profile pour lui et Bella, Travis comprend que sa vie est sur le point de basculer de nouveau. Et, cette fois, il doit faire face à un choix impossible : a-t-il le droit de se mettre en danger pour protéger sa fille ?
Cusset Catherine – Une education catholique
« ‘Remarque, je la comprends. C’est plus amusant de lire un roman que d’aller à la messe.’ Papa, furieux, se retourne contre maman et l’accuse de saper les fondements de ma foi. Elle rétorque qu’elle n’a rien dit de mal, que de toute façon chacun est libre de penser comme il veut, et que je suis bien capable de juger par moi-même ce qui, de la lecture d’un roman ou de la messe, est le plus amusant. ‘Elle n’a qu’à rester à la maison! hurle papa. Puisque c’est comme ça, j’irai seul!’ Vite je ferme mon livre, je me lève, je mets mon manteau, je suis papa. »Marie, la narratrice de La haine de la famille et d’Un brillant avenir, raconte ici les rapports qu’elle a entretenus avec la religion au cours de son enfance et de sa jeunesse, entre un père croyant et une mère athée. Elle évoque la naissance du désir à travers des passions successives, et la découverte de l’amour, vécu d’abord comme une crucifixion, puis comme une rédemption.
Delacourt Gregoire – On ne voyait que le bonheur
« Une vie, et j’étais bien placé pour le savoir, vaut entre trente et quarante mille euros.Une vie; le col enfin à dix centimètres, le souffle court, la naissance, le sang, les larmes, la joie, la douleur, le premier bain, les premières dents, les premiers pas; les mots nouveaux, la chute de vélo, l’appareil dentaire, la peur du tétanos, les blagues, les cousins, les vacances, les potes, les filles, les trahisons, le bien qu’on fait, l’envie de changer le monde.Entre trente et quarante mille euros si vous vous faites écraser.Vingt, vingt-cinq mille si vous êtes un enfant.Un peu plus de cent mille si vous êtes dans un avion qui vous écrabouille avec deux cent vingt-sept autres vies.Combien valurent les nôtres? » À force d’estimer, d’indemniser la vie des autres, un assureur va s’intéresser à la valeur de la sienne et nous emmener dans les territoires les plus intimes de notre humanité.Construit en forme de triptyque, On ne voyait que le bonheur se déroule dans le nord de la France, puis sur la côte ouest du Mexique. Le dernier tableau s’affranchit de la géographie et nous plonge dans le monde dangereux de l’adolescence, qui abrite pourtant les plus grandes promesses.
Deville Patrick – Viva
En brefs chapitres qui fourmillent d’anecdotes, de faits historiques et de rencontres ou de coïncidences, Patrick Deville peint la fresque de l’extraordinaire bouillonnement révolutionnaire dont le Mexique et quelques-unes de ses villes (la capitale, mais aussi Tampico ou Cuernavaca) seront le chaudron dans les années 1920 et surtout 1930.
Les deux figures majeures du roman sont Trotsky, qui poursuit là-bas sa longue fuite et y organise la riposte aux procès de Moscou tout en fondant la IVe Internationale, et Malcolm Lowry, qui ébranle l’univers littéraire avec son vertigineux Au-dessous du volcan. Le second admire le premier : une révolution politique et mondiale, ça impressionne, forcément. Mais Trotsky est lui aussi un grand écrivain, qui aurait pu transformer le monde des lettres si une mission plus vaste ne l’avait pas requis. L’un finit assassiné d’un coup de piolet dans la tête, tandis que le héros de l’autre est abattu par les balles fascistes avant d’être jeté au fond d’une décharge…
On croise aussi Frida Khalo, Diego Rivera (et l’autre peintre muraliste Siqueiros, stalinien convaincu et auteur de la première tentative d’assassinat de Trotsky), Tina Modotti, l’énigmatique B. Traven aux innombrables identités, ou encore Antonin Artaud en quête des Tarahumaras et André Breton.
Une sorte de formidable danse macabre où le génie conduit chacun à son tombeau. C’est tellement mieux que de renoncer à ses rêves.
Divry Sophie – La condition pavillonnaire
La condition pavillonnaire nous plonge dans la vie parfaite de M.-A., avec son mari et ses enfants, sa petite maison. Tout va bien et, cependant, il lui manque quelque chose. L’insatisfaction la ronge, la pousse à multiplier les exutoires: l’adultère, l’humanitaire, le yoga, ou quelques autres loisirs proposés par notre société, tous vite abandonnés. Le temps passe, rien ne change dans le ciel bleu du confort. L’héroïne est une velléitaire, une inassouvie, une Bovary… Mais pouvons-nous trouver jamais ce qui nous comble ? Un roman profond, moderne, sensible et ironique sur la condition féminine, la condition humaine.
Donner Christophe – Quiconque exerce ce métier stupide mérite tout ce qui lui arrive
Qui se souvient de cette folle ambition : le cinéma va changer le monde ? Démiurges au centre de l’intrigue, un trio de meilleurs amis qui vont devenir les beaux-frères ennemis : Jean-Pierre Rassam, Claude Berri, Maurice Pialat. La soeur du premier, Anne-Marie, épouse le deuxième, dont la soeur, Arlette, vit avec le troisième. Ils ne vieilliront pas ensemble. Autour d’eux, Christophe Donner fait tourner la ronde non autorisée des seventies : Raoul Lévy, Brigitte Bardot, Jean Yanne, Macha Méril, Jean-Louis Trintignant, Éric Rohmer, Sami Frey…La grande histoire crève le grand écran : Mai 68 terrorisant le festival de Cannes ; Rassam et Berri à bord de la Mercedes de Truffaut allant sauver les enfants de Milos Forman dans une Prague envahie par les chars soviétiques ; l’improbable épopée de Godard dans les camps d’entraînement palestiniens.
Et puis, gueule de bois : après la grande bouffe des utopies, tous y en ont vouloir des sous ! Cinéastes grandioses, producteurs têtes brûlées, alcool à haute dose, parties de poker, de sexe et de drogue : des vies qui sont des films, des films qui mettent la vie en danger. Car on se tue beaucoup en ce temps-là, quand on joue encore vraiment sa peau avec l’art ? Orson Welles peut lâcher sa malédiction ironique : « Quiconque exerce ce métier stupide mérite tout ce qui lui arrive. »