Les éditions Hugo Roman lance une nouvelle collection la New Way. Le premier titre Le vide de nos cœurs de Jasmine Warga m’a retournée par son sujet et sa plume d’une justesse infinie. (Sans compter de multiples petites choses qui accumulées forment ensemble une pépite). Ce roman est une perle, une douceur brute, complexe, intense, étonnante. Etrange aussi, très étrange par son thème: la dépression et le suicide, par son ressenti… Loin d’être toujours tendre, joyeux et souriant, le récit se pose avec des mots parfois d’une simplicité désarmante, il met en page le malaise de deux adolescents. Deux héros qui se retrouvent liés par un pacte. Liés pour mettre fin à leur vie. Tous les deux ont leur raison, tous les deux, du haut de leur jeunesse ont perdu leur insouciance au tournant d’un chemin. Roman et Aysel m’ont pris aux tripes. Je les ai aimé à en pleurer. J’ai tremblé, eu mal pour eux en découvrant leur histoire.
Synopsis:
À 16 ans, Aysel n’a qu’une obsession : planifier sa propre mort à la perfection. Entre sa mère qui la regarde à peine, ses camarades de lycée qui l’évitent, et son père responsable de l’accident fatal qui a marqué sa petite ville à jamais, pour Aysel la vie est devenue trop lourde à supporter. Seul problème, elle n’est pas sûre d’y arriver seule. C’est alors qu’elle découvre Suicide Partners, un site qui lui permettra de trouver le compagnon idéal. Et c’est FrozenRobot, alias Roman, victime d’une tragédie familiale, sur qui elle jette son dévolu. Aysel et Roman n’ont rien en commun, mais ils commencent à apprivoiser leurs failles. Alors que la date fatidique approche, Aysel va devoir choisir entre son envie de mourir et celle de convaincre Roman qu’il ne devrait pas se sacrifier. Et Roman n’est pas du genre facile à persuader…
Mon avis:
La lecture laisse des traces dans son sillage, impossible d’en sortir indemne. Loin de là, elle pousse à réfléchir, à se dire qu’un geste, une parole peut changer bien des choses. La dépression n’est pas réservée à une classe de personne. Elle touche tout le monde sans distinction. Un petit rien suffit parfois à basculer. Le ton posé par Jasmine Warga s’avère bouleversant. Si vous cherchez à sourire, à rire, à avoir un gros arc-en-ciel de joie, ce n’est pas le bon titre. Le fond est plus dur, plus difficile qu’il ne semble l’être.
Aysel, seize ans, en a ras le bol de vivre. Elle ne souhaite plus continuer ainsi. En filigrane, le drame se devine. Le pourquoi du comment de son désir s’échappe en bribes, il secoue et titille la curiosité. A l’âge de tous les possibles, la jeune fille ne croit plus en rien. Elle passe un accord avec FrozenRobot, dix-sept ans. Les deux héros sont différents. Leurs personnalités détonnent l’un envers l’autre. Un but les lie: se suicider. Roman fixe une date butoir pour y arriver. Les deux compagnons devront mener leur mission et ne pas y échapper. Seulement, au fil des jours, les sentiments se nouent, les mystères se lèvent. Un vent nouveau arrive. Si l’espoir existait? Si une rencontre changeait tout? Si une étincelle enflammait un avenir moins gris? Si les nuances entre le blanc et le noir était présente? Le tout dans les yeux d’une autre personne que vous, que feriez-vous? Baisseriez-vous les bras? Les esprits se métomorphosent, découvrent autre chose que la tristesse, pansent leur blessure et avancent petit à petit. Plus l’échéance approche, plus le bouleversement est en marche.
Aysel et Roman sont un vrai coup de coeur. Un énorme. Je les ai aimé à un point dont je n’aurai pas cru possible. Ils sont merveilleux, perdus, imparfaits, attendrissants, touchants, poignants, éblouissants. Ils ont tellement de choses en eux, tellement d’amour, tellement de rêves qui ne demandent qu’à éclore. J’ai chaviré. Mon coeur a eu des milliers de papillons avec eux. Un duo somptueux plus fort qu’il n’en a l’air. J’avais peur de lire un drame morbide, avec une fin funeste, horrible… Pas une vision d’espoir, une ancre jetée à la mer, une belle aventure, la surprise était au rendez-vous. Même si voir les deux jeunes programmés leur mort à un poil dérangé ma conscience, l’a effrayé, l’a peiné… De sentir leur mal être, de les voir si au fond du trou, j’ai eu envie de leur crier de relever la tête, de s’accrocher. Et c’est ce qui arrive face à l’autre. Aysel et Roman sont deux ancres. Deux âmes qui se complètent. Le changement subtil a fait tenir mon esprit. La plume de Warga est parvenue à instaurer une palette de sentiments impressionnante de réalisme. A plusieurs reprises, j’ai eu des larmes, des sourires aussi. La dépression prend un visage original, loin des manuels, de la théorie… il marque et frappe. Laide, dure, la dépression peut se guérir, elle n’est pas à prendre à la légère. Lisez le, vous verrez.
Jasmine Warga signe une magnifique histoire avec un grand H. La rédemption de deux adolescents face à leur dépression, l’un et l’autre seront-ils la porte de salut de leur partenaire? Les ailes se brisent pour mieux s’envoler… qui sait… Le message de ne jamais baisser les bras, tenir, avancer, se relever… est merveilleusement décrit. Les nuances existent. Derrière la noirceur, la lumière de l’espoir subsiste. Elle est là en veille. Le vide de nos vies m’a fait l’effet d’une montagne russe, intense, parfois triste, parfois en colère, parfois dérangeante, toujours poignante, accrocheuse… Elle transporte à la perfection. Histoire triste et heureuse, avec un amour magnifique dans son sillage.
Merci à Valentine des éditions Hugo Roman pour cette très belle découverte.
Ma note:
9/10
*coup de coeur*
Informations:
Titre vo: My heart and other black holes
Auteure: Jasmine Warga
Traductrice: Maud Desurvire
Broché: 300 pages
Editeur : Hugo roman new way
Date de parution: 15 mai 2015
Prix: